L’association Castellum a souhaité raconter aux passants l'histoire du Castellet. Peu de villages de la taille du nôtre offrent un tel parcours avec des explications fixées sur les murs. Voilà une bonne raison pour flâner aux beaux jours dans tous les recoins du village et découvrir quelques faits marquants, quelques personnages importants ou quelques bâtiments qui ont eu leur importance dans le passé.
Les archives les plus anciennes connues faisant référence au Castellet datent du XIIe siècle. Auparavant, on sait que la Provence fut habitée par une douzaine de peuplades à l’époque gallo-romaine, qu’au VIe siècle les Saxons et les Lombards venus d’Italie mirent la région à feu et à sang, qu’au siècle suivant elle eut à souffrir de l’invasion des Sarrasins et ainsi de suite jusqu’au Xe siècle où les villes de Digne, Sisteron et Riez furent pillées et brûlées. Du village du Castellet proprement dit, on n’a en revanche pas de traces dans les archives. On sait toutefois, grâce à Claude-François Achard, qu’auparavant le village était appelé Castellum(1).
L’histoire du premier village
Avec l’abbé Féraud on en apprend un peu plus puisqu’il parle sur place de la présece d’un « vaste et beau château ». Mais on n’a de cet édifice aucune description et aucune localisation. En effet si l’on peut facilement situer l’emplacement du premier village grâce au nom de Ville Vieille (encore usité de nos jours pour désigner un secteur de la commune – et par ailleurs toujours porté sur les cartes topographiques) et grâce à de nombreux vestiges de construction sur la partie la plus haute du côteau sud du vallon de Rancure, on n’a en revanche trouvé à ce jour aucune trace d’un château. Le village se situa donc, dans un premier temps, sur les hauteurs pour des raisons évidentes de sécurité à une période où il fallait pouvoir se défendre des agressions extérieures. Or les meilleurs terrains agricoles étaient cultivés en fond de vallée, ce qui obligeait les habitants à gravir et descendre ce côteau en permanence. Aussi dès que la stabilité et une certaine paix intérieure furent rétablies, ces habitants descendirent coloniser le fond de la vallée et peu à peu le village se déplaça entièrement. L’ancien village se vida insensiblement et fut laissé à l’abandon avant de tomber entièrement en ruines. On manque d’archives dépouillées pour dater avec précision cette migration, mais on peut estimer que celle-ci commença vers la fin du XIIe ou au début du XIIIe siècle en fonction de la datation des habitations les plus anciennes qu’on trouve aujourd’hui dans les quartiers des Bernards et des Bachelas qui constituent les plus vieux témoins de l’installation des familles en fond de vallée. D’ailleurs les noms de ces quartiers viennent justement des familles Bernard et Bachelard.
Le Castellet à l’époque féodale
Au cours de son histoire Le Castellet changea plusieurs fois de mains. En effet au XIIe siècle, après le démantèlement de l’empire carolingien et le morcellement du territoire, la féodalité s’installa. Au XIIIe siècle Le Castellet dépendait des Isnard, seigneurs d’Entrevennes. Il conservera d’ailleurs le nom de Castellet-lès-Entrevennes jusque vers 1750, même après être passé, en 1543, sous la dépendance des seigneurs d’Oraison qui, du reste, obtinrent en même temps les villages d’Entrevennes et – en partie du moins – de Puimichel. En 1720 ce territoire, devenu marquisat, changea de mains et passa dans celles des Fulque, nouveaux seigneurs d’Oraison.
Les implantations religieuses
Sur le plan religieux mais aussi pour la vie quotidienne le rôle des abbayes en milieu rural fut essentiel. Au XIIe siècle la puissante abbaye de Saint-André de Villeneuve, tenue par des bénédictins, implanta une église et un prieuré au Castellet. Cette implantation stratégique sur la route reliant Sisteron à Riez favorisait les échanges culturels et commerciaux. Mais le choix de l’implantation tenait compte également de la situation géographique : c’est l’endroit le plus large en fond de vallée à la jonction du torrent de Rancure et de celui de Puimichel. Les dépôts d’alluvions y sont les plus nombreux et la terre y est aussi la moins ingrate. Cela favorisa ainsi tout à la fois le développement de l’agriculture, du pastoralisme, de l’industrie du bois et donc l’essor économique de la région. Les bénédictins lancèrent la culture de la vigne (pour le vin de messe). D’ailleurs jusqu’au milieu du XXe siècle au Castellet de nombreuses familles faisaient leur propre vin… un vin plutôt estimé si l’on en croit l’abbé J.-J.-M. Féraud, auteur d’une Géographie historique et biographique des Basses Alpes en 1844, qui écrit « la culture des terres occupe tous les habitants, et le sol produit des grains, de l’huile et de très-bon vin ». Parallèlement Le Castellet dépendit pendant un peu plus de 800 ans (de 990 à 1801) du diocèse de Riez.
Note
1 - Castellum, nom latin dérivé de castrum (fort, place forte) désignant un château fort. Mais castrum désigne également une ville, tout comme castellum désigne aussi un hameau de montagne (cf Félix GAFFIOT - Dictionnaire illustré latin-français).
En 2013 l'association CASTELLUM a inauguré le parcours historique à travers les rues du village. Des plaques commémoratives sur des façades rappelent ainsi aux Castellians et aux visiteurs la richesse du passé de notre village. Douze plaques mettent à l'honneur des personnalités, expliquent des événement historiques ou rappellent le passé de certaines constructions. Ce parcours historique avait été inauguré par le maire Henri Garcia, le conseiller général Serge Sardella, le président de CASTELLUM de cette époque Serge Klutchnikoff et le président d'honneur André Laurent.
1 et 2 - Silvère et Fortunée Itard, offrent une mairie et une école au Castellet - Silvère Itard, juge de paix et maire du Castellet, mort sans enfant, a légué à la commune cette maison avec son jardin et ses dépendances pour y installer, après le décès de son épouse, les bureaux de la mairie et l’école.
3 - Maison de naissance de René Barras, maire du Castellet de 1965 à 2002 - Ici est né en 1927 René Barras, maire du Castellet jusqu’a son décès en 2002. Cette maison acquise par la commune abrite la maison des associations et un logement locatif. Le rez-de-chausée sert aussi pour des expositions.
4 - Le moulin à huile en activité jusqu’à la guerre de 14 - Ce bâtiment était aux siècles passés un « moulin à sang », mu par la force animale. Aujourd’hui ne restent plus que le pressoir, sa chapelle et son mur de force, pour résister à la pression lors de l’écrasement des olives.
5 - L’église Saint-Pierre, 900 ans de transformations - En 1178 l’église du Castellet fut édifiée par l’abbaye de Villeneuve-les-Avignon. Lors de son agrandissement en 1622, l’abside originelle fut démolie. Enfin en 1995 d’importants travaux furent menés par la commune pour restaurer l’édifice alors en piteux état.
Le clocher du XIXe siècle, un chantier plutôt tumultueux - En 1849 l’architecte Louis Dellasanta fut chargé d’ajouter un clocher. Les travaux débutèrent en septembre 1852. Mais suite à des pluies diluviennes les murs s’ écroulèrent. Le clocher ne fut terminé qu’en 1854. La cloche de 1671 fut alors remontée à 13 mètres.
6 - Les insurgés de 1851, cinq Castellians condamnés - Pascal Bicaïs, Jean Louis Hypolite Brémond, Louis Jean Baptiste Durand, Antoine Guichard, Louis Joseph Tourniaire, cinq habitants du Castellet ayant participé à l’insurrection bas-alpine suite au coup d’État de Louis-Napoléon Bonaparte du 2 décembre 1851, ont été emprisonnés à Digne et condamnés. Honneur à ces défenseurs de la République !
7 - Fontaine et lavoir de la place de l’Église - a fontaine de la place de l’Église est la deuxième à avoir été construite, en 1860-1861. C’est la seule du village à avoir une disposition centrale et à ne pas être adossée à un mur. Quant au lavoir, adossé, lui, à la façade de l’église, il a été construit 23 ans plus tard, en 1884, sous la demande pressante des habitants du centre du village.
8 - Monument aux morts - Ce monument aux morts a été édifié en 1919 sur un terrain offert à la commune par Théophile Reboul en hommage aux huit Castellians tués lors du premier conflit mondial.
9 - Maison porte-drapeau - Le 26 décembre 1848 le conseil municipal choisit cette maison – en raison de son emplacement central – pour y installer le drapeau tricolore offert aux communes par la République.
10 - Aire de foulage - Pour contourner la dîme due au clergé pour le foulage du blé sur ses terres, les paysans réservèrent des aires sur leurs propres terres au XIXe siècle. Celle-ci est encore bien préservée et on peut y voir les rouleaux en pierre attelés derrière un cheval pour écraser le grain.
11 - Four à pain du Castellet, les derniers boulangers du village - Ici était le four. Le magasin était un peu plus bas dans la rue de la Carrière. Les derniers boulangers du XXe siècle furent M. Richebois (jusqu’en 1930), M. Sanchez (jusqu’en 1936), M. Gaze (jusqu’en 1950), M. Jourdan (jusqu’en 1958) et Teddy (jusqu’en 1960).
12 - Brigandage et agression de commerçants au carrefour de la Croix - Depuis le XVIe siècle jusqu’à la fin des années soixante s’élevait dans ce carrefour une grande croix de bois de plus de 3,50 m. de haut. C’est là que le 9 messidor an IX (24 juin 1801) un groupe de brigands agressa et larda de coups de poignards huit commerçants revenant de la foire de Valensole.
13 - Le jardin de Clément - Cet ancien jardin de leur époux et père Clément Giraud (1920-2006) – a été offert à la commune par Lucette et Annie Giraud pour que les enfants et les familles puissent y passer d’agréables moments de jeu et de détente.
14 - Acte de dévouement et de courage - Antoine Frédéric Barras, cantonnier, a été décoré de la médaille d’honneur sous le second Empire, pour avoir, « le 14 juin 1866, sauvé, au péril de sa vie, deux femmes et un jeune enfant dont la demeure venait d’être envahie par les eaux » du torrent de la Coussière en crue.
15 - Fontaine-lavoir des Bachelas - Construite en 1884, la même année que le lavoir de la place de l’Église, cette fontaine-abreuvoir-lavoir a été financée par les habitants du quartier eux-mêmes et non par la municipalité.
16 - Fontaine-lavoir du Pountis - C’est le premier point d’eau du village construit au XVIIe siècle. Il ne s’agissait alors que d’une fontaine à deux bassins et deux canons. Le lavoir fut rajouté en 1833 et le toit en 1896. Le pountis qui surplombe le passage de la rue de la Calade est une arcature datant de l’époque médiévale.
17 - Une jardinière du début du XXe siècle - Ce véhicule hippomobile du début du siècle dernier servait à transporter les fruits et légumes la semaine et permettait de promener la famille le dimanche. Cette jardinière a été offerte à la commune par René Barras et son épouse.
18 - Louis Laurens (1780-1837), pharmacien et chimiste renommé - Louis Laurens, né au Castellet, fit des études pharmaceutiques à Paris, passa un doctorat à Montpellier et enseigna la chimie à Marseille. Inspecteur des hôpitaux, membre de l’Académie des sciences et de la Société de médecine, il est décédé à Marseille du choléra.
19 - L’Humeaudière, le havre d’un poète - Edmond Humeau, homme de lettres, poète et résistant né en 1907, fit de cette demeure, de 1953 à son décès en 1998, une retraite de réflexion et d’amitié, accueillant les plus grands artistes et écrivains du XXe siècle.
20 - Meurtres au Castellet, les républicains victimes des royalistes - Le 25 thermidor an V (12 août 1796), quarante-deux royalistes d’Oraison ont tué – dans sa maison qui s’élevait ici – d’un coup de feu à la tête tiré d’en face, un vieux cordonnier, Crespin Meynier. Le jeune Brémond, 15 ans, fut, lui, assassiné de trois coups de poignard.
21 - Aire de battage - Cette aire, dite de Brès, est la plus ancienne du village, édifiée dès le XVIe siècle sur cet emplacement privilégié : en hauteur par rapport au village, elle bénéficie de vents dominants permettant le battage des céréales au fléau.
Les plaques du parcours historique
Douze plaques ont été réalisées par l'association CASTELLUM et apposées à différents endroits du village pour rappeler les événements importants qui s'y sont déroulés ou pour signaler des emplacements particuliers. En parcourant les rue du Castellet pour les rechercher vous découvrirez de nombreuses autres richesses répertoriées sur le plan ci-dessus. Nous vous souhaitons une agréable visite.